Musée de l’Opéra de Vichy

Publié le 27/04/2011

 

Dès le XIXe siècle, la ville de Vichy révolutionne le thermalisme en proposant aux curistes une démarche tout à fait nouvelle. On ne vient plus désormais seulement pour le thermalisme ; celui-ci est indissociable des plaisirs et des divertissements qui l'accompagnent : valses, polkas, pièces de théâtres, opérettes, jeux… Et le XXe siècle sera encore beaucoup plus rayonnant. La Reine des villes d'eaux deviendra, très vite, « la Capitale d'été de la musique » en accueillant les plus grands artistes du siècle. Aujourd'hui, c'est l'association Le Musée de l'Opéra, qui gère l'un des fonds d'archives les plus importants d'Europe, qui veille à la conservation, la mise en valeur et l'exposition de ce patrimoine à la valeur inestimable.

Voyage au cœur de plus de 100 ans d'archives et de mémoire d'une vie artistique extraordinaire.

Un haut lieu de culture au service de l'art

 

Dès le XIXe siècle, la ville de Vichy révolutionne le thermalisme en proposant aux curistes une démarche tout à fait nouvelle. On ne vient plus désormais seulement pour le thermalisme ; celui-ci est indissociable des plaisirs et des divertissements qui l'accompagnent : valses, polkas, pièces de théâtres, opérettes, jeux… Et le XXe siècle sera encore beaucoup plus rayonnant. La Reine des villes d'eaux deviendra, très vite, « la Capitale d'été de la musique » en accueillant les plus grands artistes du siècle.

Aujourd'hui, c'est l'association Le Musée de l'Opéra, qui gère l'un des fonds d'archives les plus importants d'Europe, qui veille à la conservation, la mise en valeur et l'exposition de ce patrimoine à la valeur inestimable.

Voyage au cœur de plus de 100 ans d'archives et de mémoire d'une vie artistique extraordinaire.

Par ici, des affiches datant de la fin du XIXe siècle. Elles racontent les spectacles incroyables donnés à Vichy : concerts d'orchestre, mazurkas, pièces de théâtre en un acte. Les affiches vont de 1879 à nos jours. Par là, des milliers de photos, des costumes de scène, des noms emblématiques toujours vivants au Musée de l'Opéra : Georges Saracco (qui dirigeait la troupe de ballet à Vichy en 1901 alors qu'il était maître de ballet de la Scala de Milan et du Théâtre de la Monnaie de Bruxelles), Carlotta Brianza (danseuse étoile du début du siècle dernier), Maria Koustnezoff, Théodore Wassilieff, Yvette Chauviré, Noureev, Maurice Béjart… et même Patrick Dupond. Des photos, il y'en a des milliers, de tous les noirs et de toutes les couleurs. Les répertoires, innombrables : Chrysotémis, Coppélia, Flavonice, Javotte, La Chèvre de Monsieur Séguin, Pirouettes… Il ne faut pas trop s'y attarder, c'est à en avoir le tournis tant la liste est infinie et éblouissante. Mais il faut préciser que 98 Damnation de Faust ont tout de même été données à Vichy !

Voilà donc le défi qu'a voulu relever Josette Alviset, musicologue, historienne de l'art et professeur de musique. « Je ne suis pas née à Vichy, mais cette ville est indissociable de mon enfance et de ma jeunesse. Mon père étant l'un des musiciens du Grand orchestre de Vichy, je venais chaque été y passer mes vacances », confie-t-elle en se rappelant les origines de son attachement à la ville thermale.

L'envie d'aller plus loin- au-delà de ses souvenirs de spectatrice ébahie-, l'idée du musée et du travail titanesque qu'elle commencera en 1987 archive par archive lui vient quand un professeur de musicologie de la Sorbonne lui demande un article sur la vie artistique vichyssoise. « Je savais que le théâtre du Grand Casino était l'un des plus grands de France, que sa vie avait été marquée par de grands événements et de magnifiques représentations. Il était alors pour moi inconcevable de laisser une telle richesse tomber dans l'oubli. Mais il n'y a là aucune nostalgie, c'est à un vrai travail de mémoire, de conservation et de mise en valeur que je me suis consacrée. » Josette Alviset ne va pas tarder à commencer ses recherches, ses fouilles : caves, greniers, contact de différents particuliers, réseaux d'amis et de connaissances…

Vichy, la ville en vogue

Au moment où les salles parisiennes étaient limitées à un peu moins de 1000 spectateurs (hormis l'Opéra Garnier), le théâtre du Grand Casino avait une salle dorée qui pouvait accueillir jusqu'à 1400 personnes. Elle a été ouverte en 1901. Cela explique l'engouement suscité par cet endroit prestigieux et la notoriété de la ville de Vichy dans la vie artistique française de l'époque. Les journées des curistes et des touristes de tous bords, des hommes d'affaires aussi, étaient alors rythmées par la musique permanente qui habitait le parc thermal, les kiosques, les salles de théâtre du music-hall. Le verre d'eau de la cure thermale s'accompagnait inévitablement des voix et des pas des comédiens, des répliques tout droit sorties des plus grandes pièces de théâtre, des airs, sérieux ou pas, interprétés par les plus grands noms de l'opéra-comique. En peu de temps, Vichy devient le miroir de la culture contemporaine, le reflet de la vie artistique, la référence. Bref, le lieu où il faut être pour fréquenter le monde artistique et avoir un œil sur les chefs-d'œuvre joués à Paris, Saint-Pétersbourg, Vienne ou La Scala de Milan. On y vient pour assister aux plus grands concerts, aux opéras-comiques les plus prestigieux, aux opérettes en vogue : de Mam'zelle Nitouche (opérette) à La Grande Duchesse de Gérolstein (opéra-bouffe) en passant par La Fille de Madame Angot. 75 représentations sont données pour le seul été de 1901. Les plaisirs de la villégiature sont sans fin, la vie mondaine et bourgeoise trouve à Vichy toutes les distractions imaginables : jeux, billard, golf, concours hippiques, tir aux pigeons…

Ah la belle époque !

110 ans après l'ouverture de la nouvelle salle du théâtre du Grand Casino, le Musée de l'Opéra donne à tout le monde la possibilité de revivre ces grands moments de spectacle que peu de villes ont eu la chance de connaître. Car depuis plus de 20 ans, Josette Alviset récupère et collectionne tout objet qui témoigne de la vie artistique de la station thermale au siècle dernier. Maintenant, le fonds est propriété de la ville ; il est géré et entretenu par l'association Musée de l'Opéra. Beaucoup d'archives ont été récoltées grâce à l'acharnement et à la persévérance de la directrice du musée : « Lorsque j'ai commencé ce travail, peu de gens y ont cru. Si des proches m'ont encouragée, beaucoup de personnes ont pensé que ma fougue allait vite s'éteindre. Mais, assez vite, en 1988, nous avons fait notre première exposition. Puis nous avons connu des moments plus difficiles que d'autres, jusqu'à la création du musée en 2002. »

Le musée est né grâce à un courrier providentiel : « J'ai reçu en 1999 de madame Péronnet, veuve de Gabriel Péronnet, un courrier exprimant le souhait de perpétuer sa mémoire et celle de son mari en fondant une institution artistique. C'était pour moi, ajoute Josette Alviset, une occasion à ne surtout pas rater, d'autant que notre Q.G. se situait à l'époque dans les caves du Centre Culturel Valéry-Larbaud ! Une occasion donc pour notre association de passer véritablement à la lumière. » La fondation Gabriel et Noëlle Péronnet est née la même année ; le musée ouvrira ses portes dans les anciens locaux de la Caisse d'Épargne (achetés par la fondation) en juillet 2002. Le projet est bien précis : conserver le fonds d'archives du théâtre du Grand Casino, le mettre en valeur et le rendre accessible au grand public comme aux spécialistes, en organisant des visites et des expositions. Voilà un moyen de rendre compte de plus d'un siècle d'une vie culturelle, artistique et mondaine dense, associée à foultitude de plaisirs et aux grands noms d'acteurs, d'artistes et de compositeurs. « Au cours du siècle dernier, tout le grand répertoire lyrique a été représenté dans la magnifique salle de l'Opéra de Vichy, porté par les artistes les plus talentueux et les plus célèbres. Quantité d'œuvres plus légères, opérettes françaises ou viennoises, petits opéras-comiques et opéras-bouffe s'y sont également donnés », précise la directrice. Bien sûr nous parlons d'une époque où Vichy n'avait rien à envier à Vienne, Saint-Pétersbourg, Bruxelles, Bayreuth ou Milan. La scène vichyssoise donnait le ton, plusieurs artistes y programmaient leurs premières représentations pour escompter un écho international.

Et après le temps de la danse et de l'opérette est arrivé celui du Festival.

Le Festival, vous-en rappelez-vous ?

La ville de Vichy a toujours su se renouveler en fonction des époques et des modes. Au début du XXe siècle, elle a été le pôle artistique vers lequel ont convergé les plus grandes œuvres. Entre les deux guerres, c'était la destination favorite des curistes qui cherchaient à profiter des meilleures distractions. Dans les années 30, la station thermale devient un vrai Las Vegas grâce à ses casions courus par des dizaines de milliers d'adeptes. 1935 voit plus de 200.000 visiteurs arriver avec leurs valises pour croquer les joies du divertissement et de la scène. Bref, à Vichy se sont côtoyés tous les pouvoirs : politique, économique, artistique et mondain, d'où la notoriété indiscutable de la ville. La même année, 1935, vichy a été consacrée « lieu inégalé de la conjonction de l'innovation et de la création musicale » alors que la Tétralogie de Wagner a été donnée dans le théâtre du Grand Casino et non à Bayreuth.

Après le temps des grandes fêtes, qui continueront mais plus modestement, le 1er Festival de musique de Vichy s'ouvre en 1952. Il s'étalera sur 200 journées, jusqu'en 1963, avec 120 concerts et 50 représentations lyriques (Le Musée de l'Opéra vient d'ouvrir son exposition Festival de Vichy de 1952 à 1963 ; elle se poursuivra jusqu'en décembre). Avec le Festival, c'est un autre chapitre artistique qui s'ouvre, un autre intérêt que suscite la station thermale : une fois encore, Vichy devient la destination à prendre pour se distraire et s'instruire des choses du monde. C'est aussi un moyen d'oublier les horreurs de la guerre.

L'exposition du Musée de l'Opéra en rend véritablement compte, et le voyage vaut le détour.

En tout cas, le mérite de Josette Alviset et de son association, présidée par Jacques Thierry, c'est de sauver de l'oubli un gros chapitre artistique de la ville de Vichy. Ce travail se fait et se poursuit tous les jours, les expositions attirent jusqu'à 50.000 visiteurs chaque année. Mais l'intérêt du musée, c'est aussi de servir les étudiants, les chercheurs, les historiens et tous les curieux. Car en se promenant dans le Musée de l'Opéra, des chapitres de l'histoire s'ouvrent, des visages emblématiques (Georges Prêtre, Régine Crespin, Jean Vilar…) deviennent familiers, les habitudes de la vie vichyssoise d'il y a plusieurs décennies n'ont plus aucun secret pour le visiteur. Et quand on quitte le musée, on comprend que Vichy a effectivement toujours été une ville ouverte sur le monde !

Musée de l'Opéra de Vichy

16 rue du Maréchal Foch

Tel: 04 70 58 48 20

En ce moment (jusqu'au 16 décembre):

Exposition « Festival de Vichy de 1952 à 1963 ».

Contact : musee.opera.vichy@orange.fr